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Nous voilà condamnés au plaisir coupable

Lorsque l’on interroge la génération Z, en particulier les consommateurs de 20 ans, on est souvent surpris, voire dubitatif, face à leurs préférences. On peut entendre tout et son contraire au cours d’un même entretien, et il faut un minimum de recul pour pouvoir tirer des enseignements pertinents.


Cela semble logique ! Un jeune consommateur construit petit à petit sa maturité culinaire, évoluant vers des préférences plus définies. Toutefois, certains choix ne sont pas uniquement liés à leur éducation gustative, mais aussi à des a priori ou des influences externes, comme les réseaux sociaux.


J’ai eu l’opportunité d'interroger à plusieurs reprises ces jeunes consommateurs, et il ressort une dualité évidente : d'un côté, un discours de rejet envers les fast-foods, associés à une critique du capitalisme et d'une alimentation perçue comme trop grasse ou non durable ; de l'autre, une fréquentation régulière de ces mêmes enseignes précédemment pointées du doigt. C'est ici qu'intervient ce que l'on pourrait appeler le plaisir coupable.


Ces contradictions se manifestent également dans la consommation de pâtisseries américaines. Le donut, le muffin, et surtout le cookie, sont devenus les emblèmes de cette ambivalence. D'un côté, ces pâtisseries sont visuellement irrésistibles, parfaitement taillées pour les réseaux sociaux avec leurs glaçages colorés et leurs formes généreuses. De l’autre, elles sont perçues comme le contraire de ce que la jeune génération valorise : des produits loin d’être "healthy", mais tellement gourmands qu’ils sont difficilement rejetables.


L'essor des donuts : une frénésie parisienne


Prenons l'exemple du donut, qui connaît une véritable frénésie en France, particulièrement à Paris. Des enseignes comme Krispy Kreme ont fait leur entrée fracassante, tandis que le retour de Dunkin’ Donuts a relancé la course aux beignets colorés.



Aujourd'hui, de nombreuses enseignes de restauration rapide en France proposent des donuts, faisant de cette pâtisserie une incontournable pour les amateurs de sucre. Le donut s’affiche fièrement sur Instagram, devenant une icône de la pause gourmande, incarnant à la fois l’instant plaisir et la culture pop américaine.

Est-ce que le donut va remplacer le pain au chocolat ?

Aucune chance, même si Dua Lipa ou Taylor Swift se mettaient en scène dans une baignoire remplie de donuts au glaçage multicolore sur les réseaux sociaux. Mais il prend de l’espace au fil du temps.


Le cookie : entre tradition et modernité


Le cookie, quant à lui, s’inscrit dans une histoire plus ancienne en France. Des enseignes comme Laura Todd ont popularisé le cookie classique depuis des années, mais des acteurs plus récents, comme Scoop Me a Cookie, ont apporté une nouvelle dimension à ce plaisir coupable avec des versions mi-cuites. Vous devriez également tenter l’expérience surnaturelle du cookie Noisette de chez Land & Monkeys pour mieux comprendre.



Ces cookies sont à la fois croustillants et fondants, offrant une expérience gourmande irrésistible avec une vraie appétence pour la version mi-cuite, pas trop facile à digérer, mais totalement « culpabilisante ».


Véritable bombe calorique, le cookie devient l’alliance parfaite du réconfort et de l’excès. Cette montée en gamme du cookie montre bien que, malgré leur conscience de la santé, les consommateurs continuent de se laisser séduire par ces plaisirs "tout sauf light".


Dans cette même dimension, un certain nombre de desserts en restauration ont suivi un chemin similaire. Des classiques comme la pavlova ou le fondant au caramel, ainsi qu'une multitude de pâtisseries, en particulier les plus qualitatives, s'inscrivent dans cette tendance.


On peut citer, par exemple, les célèbres Merveilleux de Fred, qui ont su conquérir un large public avec leur délicatesse et leur légèreté, ou encore le succès de la tarte au citron meringuée revisitée par des chefs pâtissiers, avec pour objectif de représenter le mariage parfait entre tradition et modernité.



Ces pâtisseries, souvent associées à un savoir-faire artisanal, illustrent bien l’évolution de la gastronomie sucrée vers des créations de plus en plus sophistiquées, mais elles ont souvent un critère qui raisonne le sentiment de culpabilité : comme un fruit frais…


Le paradoxe du plaisir coupable


C’est là que réside tout le paradoxe. Le consommateur, même soucieux de sa santé et de prolonger son espérance de vie, cède parfois à ces plaisirs sucrés. Il compense souvent ces excès par d'autres choix plus sains à d'autres moments de la journée.


Ce phénomène, nous l’avons observé dans les focus groups, comme le montre la vidéo disponible sur le blog de Strateg'Eat, où des "heavy users" de ces produits expliquent leur relation ambivalente à ces douceurs. Leurs témoignages montrent comment ces plaisirs coupables jouent un rôle clé dans leur quotidien, même s’ils sont conscients des contradictions que cela génère.



Dans cette optique, l’intérêt pour les marchés de la restauration et de la pâtisserie réside dans la nécessité de maintenir une offre à la fois qualitative et accessible.


Que ce soit dans les établissements gastronomiques ou même dans les enseignes de fast-food, il y a un besoin constant de satisfaire un consommateur qui, selon les moments, peut être décomplexé dans ses choix.


Ce consommateur peut apprécier la simplicité d’un menu rapide ou, de manière plus ponctuelle, rechercher des créations sophistiquées, voire artisanales. Cette dualité dans les attentes montre l’importance, pour les acteurs de la restauration, de proposer une offre bien calibrée, capable de répondre à cette diversité de demandes, tout en capitalisant sur des produits de qualité qui font la réputation de ces secteurs.


Bien que ces pâtisseries soient tout sauf "healthy", elles continuent de captiver les jeunes consommateurs grâce à leur côté visuel, leur goût inégalé et leur capacité à transformer un instant en une pause réconfortante et assumée. Elles tracent également la voie, avec leur « amie pour la vie » la boisson gourmande, vers de nouveaux instants de consommation, à toute heure de la journée et en association avec toutes formes de repas.


Le plaisir coupable n’a jamais été aussi savoureux.

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