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Le fait maison : Vraiment une fausse bonne idée !

Dernière mise à jour : 22 avr.


fait maison

C’est la première fois que je me lance dans l’exercice de rédaction d’un article à destination du réseau Linkedin. Il faut être transparent jusqu’au bout ! C’est mon beau-frère qui m’a convaincu de l’intérêt de tester car c’est, parait-il, une jolie opportunité d’être mieux référencé sur les moteurs de recherche. 


Et la situation s’y prête, le nouveau décret fait maison : quel dommage et que de temps perdu ! 


Il est bien évident que mon opinion n’a pas beaucoup de valeur !


Je ne suis pas un de ces exceptionnels restaurateurs haut de gamme qui fait vibrer le patrimoine gastronomique français depuis des siècles. Une restauration d’excellence bien transmise aux nouvelles générations qui pratiquent notamment la « revisite » avec adresse dans les émissions de télé branchées. 


Je ne suis pas non plus la restauration assise du « cran du dessous » qui regroupe près de 95.000 établissements en France. Aux Etats Unis, on a l’habitude de l’appeler « casual dining » car elle regroupe tous les établissements de moins de 50 euros de ticket moyen repas et occupe le terrain du quotidien de nombreux français au travers de son plat du jour, mais aussi par le biais de sa très grande créativité. Force est de constater que, haut de gamme ou pas, ces établissements sont tous au rendez-vous depuis 20 ans de la poussée qualitative (ou montée en gamme du marché).


Avec un engagement sans faille et une volonté de faire plaisir, créer des instants de convivialité, « signer » un plat, réconforter, faire voyager ; cette restauration assise est et continue d’être « dans la place ». 


Je ne suis pas non un acteur du snacking qui inclut la boulangerie pâtisserie et la restauration rapide. J’ai été associé dans quelques restaurants qui n’ont pas tous fonctionné (je crois que cette partie n’est pas trop vendeuse pour un expert de la restauration), mais à l’heure où les portes du formidable sandwich & snack show  se ferment, on peut voir à quel point ces acteurs font corps avec la restauration hors domicile.

Au-delà de la « malbouffe » que tous les détracteurs aiment bien surligner, il y a plein de moyens pour ajouter de la « culinarité » & de la fraicheur au snacking et force est de constater qu’il ne s’agit pas d’une minorité, mais plutôt d’un courant qui a bien le vent en poupe. 



Mon droit à la parole est donc limité. Mais accordons nous le temps et le droit à la relance via le concept de la « validation des acquis professionnels », les près de 25 années passées à analyser et à conseiller les fournisseurs de la restauration et de la boulangerie sur le marché français et dans de nombreux pays dans le monde.

C’est donc l’expérience, qui est bénéfique lorsque l’on n’est pas trop nostalgique », qui me motive de coucher sur papier mon point de vue. Bien entendu soutenue par les décisions en cours ! Je suis d’autant plus concerné que j’ai comme une impression française de « déjà vu » puisque j’avais été convié avec une brillante association dédiée au foodservice (GECO) à participer à des échanges sur le décret fait maison en 2014.


Il faut dire, qu’à l’époque, j’étais plus jeune, ce qui était le cas également d'un des assistants du rapporteur de l’Assemblée nationale, fraichement moulu des rangs de belles formations destinées à former les décideurs pluridisciplinaires de demain. J'ai eu la possibilité de communiquer un certain nombre de résultats d’études que nous avions collectés pour l’occasion et qui rappelaient le non-sens de la démarche. 


Une légère sensation de frustration dans les propos qui étaient évoqués, un peu similaire à celle que vous pouvez avoir à la maison quand vous souhaitez passer un message à vos enfants et votre femme et que vous vous avez l’impression que votre micro est coupé.


Au bilan quand on regarde les 10 années écoulées, on n'est pas certain de l’efficacité du décret et je modère mes propos, habité par un grand sentiment de civisme et de respect pour toutes les instances politiques, qui, bien entendu, au-delà de l’image oligarchique qu’elles peuvent inspirer parfois, sont d’abord consacrées à cet engagement de faire du mieux et de servir.


C’était probablement, et c’est, mais je doute un peu plus en 2024, la volonté de servir mieux le consommateur français qui motive le décret en cours..

Pourtant, il faut constater que nous avons, dans ces 10 dernières années, générer, plus de divisions, de confusions, de travaux inutiles pour le restaurateur que de résultats à proprement parler, si ce n’est une poussée qualitative du marché. 


On pourrait admettre l’idée que le décret fait maison de 2014, a participé à l’indiscutable montée en gamme de tous les restaurants sur toute la France. Mais il y aurait également des arguments contraires qui pourraient démontrer que la restauration rapide haut de gamme et son développement a beaucoup influencé ce niveau d’exigibilité, comme les VTC ont poussé les taxis parisiens à devenir meilleurs. 

On peut également ajouter à cela l’émergence de restaurateurs autodidactes en plus des jeunes chefs de formation qui casse les codes.


Et aussi la boulangerie pâtisserie avec des exploitants brillants, qui ont donné encore plus envie au marché de faire du bon, et toutes ces émissions gastronomiques, les jeunes youtubers fougueux et les exceptionnels critiques gastronomiques de ma génération très efficaces dans l’incitation et l'excitation des papilles (@françois regis gaudry@Emmanuelle Jary). 


Donc si je dois me faire le bilan des 10 années écoulées sur le décret, je dirais que c’était pas mal de temps perdu au final. Je ne devrais pas m’en plaindre, car en tant que prestataire, cela m’a permis d’occuper l’espace durant conférences et interviews et de vendre pas mal d’études !


Encore une fois j’aimerais bien insister qu’à l’heure où nous sommes de moins en moins nombreux à respecter les politiciens de notre belle nation, il ne s’agit absolument pas d’incriminer les élus qui auraient pris la décision de s’investir sur ce décret. Mais cela sent l’histoire du député qui, dans son bon restaurant gastronomique, félicite le chef pour sa nouvelle recette de ris de veau et le chef en profite pour lui parler de ses restaurateurs qui font de la m…. en ouvrant de pleines poches sous vides de blanquette alors qu’il lui a fallu plus de 3 personnes pour cuisiner son assiette. 


Et là le député lui répond : « t’inquiète pas René, on va s’en occuper…  Je n'ai rien contre les personnes qui s'appellent René, mais c’est malheureusement parfois un repas d’oligarques qui crée des décisions d’oligarques. J'espère vraiment me tromper sur le repas avec René, mais cette histoire de décisions deconnectées avec la réalité est plus vieille que le monde, mais en tendance baissière, en réalité, si l’on fait l’effort de regarder les dernières décennies. 


Mais le problème c’est qu’entre le restaurateur qui fait fumer son saumon lui-même et celui qui ouvre de pleines poches de blanquettes de veau, il y a environ 95 000 établissements . Dans les années 2010, un journaliste avait tenté de me convaincre de parler de ces restaurants qui n'utilisent que des produits finis. J’avais refusé l’opportunité, et m’étais permis de lui dire qu’il s’agissait d’une minorité. C’est encore plus le cas actuellement ! 


Mais après tout ! Est-ce que c’est si grave ? 

Est-ce que finalement l’objectif ne serait pas de chercher à rassembler plutôt qu’à diviser ? 


Nous avons passé ces trois dernières décennies à essayer de distinguer les restaurations :  Restauration haut-de-gamme vs rapport à Restauration moyen de gamme,  Restauration à table vs Restauration rapide vs boulangerie pâtisserie. 

C’est pourtant dans ce mélange des genres que l’on arrive à sublimer la restauration hors foyer, dans cette approche de plus en plus hybride où les styles s'entremelent et où il n’y a pas de règles drastiques à respecter si ce n’est des obligations en termes de provenance, de fraicheur, de traçabilité, de transparence, d’origine France, de qualité et d’engagement du restaurateur. 


De mon petit point de vue, je n’ai pas l’impression que nous soyons à côté de la plaque ! Il y a tellement de restaurateurs engagés avec de petits moyens à disposition mais toute leur âme est en jeu ! C’est donc leurs capacités,  leur gamme, leur localisation et les types de consommateurs qu’ils ont en face d’eux qui imposent des choix dans la cuisine que l’on est en mesure de pratiquer. 

La restauration c’est cet autodidacte qui est fan de restau, ce chef qui a bien tout appris de ses pairs. Pour l’autodidacte, il comprend petit à petit qu’il ne suffit pas de bien faire la « popotte » à la maison pour être un bon restaurateur. Dans le même temps, il dynamise de nouvelles choses : RH, marketing de l’offre, communication, optimisation en recrutant un chef…. 


Pour le chef de cuisine. il comprend que ce qu’on lui a enseigné fait de lui un être à part, se dépasse quand même sur tous les flancs et crée sa signature. Je pense à ce restaurant moyen de gamme, plus cosy le soir,  qui sert ce merveilleux plat du jour à 13 € hyper bon et réconfortant que vous connaissez probablement tous. Le restaurateur va y mettre beaucoup « d’affect » et embarquer ses petites équipes. Soutenu par sa télévendeuse qui lui aura conseillé les bons deals et en mixant parfois produits semi-finis, bases de travail industrielles et un ajout de plusieurs ingrédients ‘biens à lui » et bruts. 


On y retrouvera fraîcheur, provenance, signature et il donnera envie d’y revenir le soir pour y passer un autre bon moment de convivialité. 

Il faut rappeler que le marché est en souffrance : des tensions sur les prix, des difficultés de recrutement pour compenser notamment ce deuxième service que le chef de cuisine ne souhaite plus faire depuis le Covid,  des lacunes de formation des équipes, des problèmes de rentabilité et de dépenses énergétiques Mais la restauration est résiliente, ces enjeux existent depuis des décennies. Certains s’accentuent, d'autres s’étiolent, le restaurateur a toujours su faire face !


Ce qu’il convient d’intégrer c’est « la restauration 3.0 », dans laquelle il n’y a plus de règles ancestrales de la bonne façon de cuisiner. Il n’y a pas de véritables choix entre fait Maison et pas fait Maison. Pas de choix à imposer sur les produits que l’on souhaite utiliser et sur les possibilités qui s’offrent à chaque établissement de créer du « plaisir et du lâcher prise » qui reste l’enjeu fondamental. 


Le  marché a évolué, les mœurs sont différentes nos jeune ados de 18-25 ans ne mangent pas de la même façon ils ne sont pas influencés de la même manière. Il y a donc de nouveaux curseurs qui définissent un bon restaurant, un restaurant engagé qui respecte ses principes de restaurateurs. Parce que la Restauration assise en particulier, mais c’est également le cas pour la restauration rapide, c’est une expérience dans l’assiette mais également au-delà de l’assiette.


Celui qui aura fait le choix délibéré ou non de ne pas être 100 % fait maison aura dans tous les cas des enjeux de taille pour apporter la convivialité, l’atmosphère, le cadre, la résonnance sur les réseaux sociaux, les toilettes propres, le service et le conseil et l’accompagnement nécessaire.

Dans une ambiance parfois décontractée parfois un peu plus protocolaire, faire voyager éventuellement au travers des mets proposés, mais surtout au travers du cadre. Toute une ambiance que l’on qualifie au-delà de l’assiette sur laquelle repose au moins 50 % de la satisfaction du consommateur actuel.


Pour illustrer au travers du dialogue du commun des mortels 


« -t’as passé une bonne soirée hier 

-j’ai passé une super soirée 

-tu te souviens de ce que t’as mangé ? 

- non pas trop, mais c’était hyper bon, on a partagé des choses et  c’était hyper sympa, y avait une ambiance de dingue. » 


Il y a donc de nouveaux enjeux et l’arbitre à ce stade n’est pas forcément le gouvernement. C’est probablement à lui de légiférer et de fixer des règles. Mais je ne crois que cela soit  le bon combat 

Il doit reposer éventuellement sur la provenance des origines, les produits frais utilisés, et puis peut-être la garantie d’un certain nombre de marqueurs nouveaux crées par cette nouvelle restauration 3.0 ! 


Mais le vrai juge, c’est le consommateur, vous et moi !


Ceux qui déjeunent et dinent au quotidien dans les restaurants, en mesure de trancher et de donner leur opinion sur des réseaux sociaux qui n’ont jamais été aussi importants, ceux qui regardent Top chef en se prenant pour un anonyme du guide Michelin qui visitent plusieurs centaines de restaurateurs par an. 

Ces consommateurs qui étaient insignifiants il y a à peine 20 ans, dont l’opinion ne comptait pas trop, représentent aujourd’hui la vraie part de voix susceptible de pousser encore plus le restaurateur qui ne jouerai pas le jeu à se dépasser. 


Si l’on se limitait potentiellement à créer un label de restaurateurs qui respectent un min de règles que l’on est même capable d’observer à distance, le consommateur fera le reste pour s'assurer que le restaurateur minoritaire qui ne fait rien maison soit rapidement sanctionné.

En faisant le choix de qualifier une recette de non fait maison, je ne vois pas comment il serait possible pour le consommateur de vouloir la commander. 


Il y a donc potentiellement plus de 90.000 restaurants à table, la restauration rapide et la boulangerie qui vont en subir les conséquences. Mais c’est un argument qui semble « débile » puisque cette idée se maintient dans le décret actuel comme l’a notamment bien mis en lumière le journaliste @Paul Fedele.

Je n’imagine absolument pas que mon article va changer quoi que ce soit, même si j’ai pris le temps de le rédiger sans faire appel à mon pote « Chat Gpt ».



Dans l’intervalle, le spectacle continue, en profitant de cette manne que vont représenter les jeux olympiques en restant positif et déterminé à l’instar de chaque restaurateur qui lutte tous les jours, comme beaucoup beaucoup d’autres professionnels !

Un restaurateur qui continue à faire plaisir, à donner envie, dans un contexte de gourmandise et de plaisir que j’ai évoqué, pour éviter que la restauration ne devienne trop fonctionnelle. 


Il faut considérer qu’il y a également uniquement qu'un tiers de nos déjeuners et diners qui sont réalisés en dehors de la maison. Il y a donc deux tiers d’actes disponibles à aller chercher.

Parce que l’évolution logique de l’histoire c’est que le « foodservice » à vocation à progresser avec le temps. Je ne sais pas si mon référencement, quant à lui,  va grimper, et puis d’une certaine façon c’est pas très grave. Je ne sais pas si quelqu’un va lire cet article en dehors de mon beau-frère.


Mais ça fait du bien de pouvoir écrire et coucher sur papier ce genre de pensées parce qu’il est normal et légitime quand on est spécialisé dans un marché de pouvoir partager son opinion quand on pressent un grand danger. 


J’ai eu le plaisir de le faire dans le cadre de l’association Leaders Club en partenariat les halles Métro en début de semaine. On m’a confirmé que mes propos avaient du sens. Je les remercie de m'avoir donné envie d'écrire cet article. 

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